Born to kill...
"J'admire ton courage, et je plains ta jeunesse.
Ne cherche point à faire un coup d'essai fatal ;
Dispense ma valeur d'un combat inégal ;
Trop peu d'honneur pour moi suivrait cette victoire :
À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.
On te croirait toujours abattu sans effort ;
Et j'aurais seulement le regret de ta mort."
Acte 2 , Scène 2 - Le Cid - Pierre Corneille
(et non pas Thomas qui, au dire de Voltaire, était "un homme qui aurait une grande réputation s'il n'avait point eu de frère.")
Quatre des treize films de Kubrick traitent de la guerre. S'il fustige l'armée, ici l'armée française, le cinéaste ne propose aucune thèse positive, pacifiste ou patriotique. Il se contente d'exposer un système absurde, voire dément. Kubrick ne met jamais en scène héros ou victoire. Le colonel Dax aurait pu être le champion de la paix si son combat avait eu une quelconque incidence sur le chaos. Mais le film s'achève avec la reprise des assauts. Et si Les sentiers de la gloire s'ouvre sur "La marseillaise", c'est pour mieux affirmer qu'aucune utopie n'a jamais transformé le monde. Le pessimisme de Kubrick, qui deviendra légendaire, éclate au grand jour. Après Les sentiers de la gloire, sommet de la première période, l'oeuvre du cinéaste explorera toujours plus avant la folie humaine. Mais il n'y manquera jamais l'humour distancié qui transforme les épisodes les plus tragiques en irrésistibles farces. Quand le condamné, en chemin vers le poteau d'exécution, pleure et supplie, l'humour du cinéaste traverse ses cris. Metteur en scène des frissons troubles, Kubrick joue diaboliquement avec la jouissance du spectateur. À travers ses méandres, le film constitue une véritable grille de lecture pour toute l'oeuvre du maître. "
D'après Arte