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  • Requins du regain...

    medium_27.jpgJe ne suis qu’un fétu de paille sur l’immense océan de la vie. Ballotté, secoué, projeté, chaviré, submergé, noyé, je m’engloutis dans la vague déferlante. Mes yeux s’ouvrent désespérément vers la surface blanchâtre et écumante. Tourbillonnant, tournoyant, chahuté par les éléments en furie, je perds la notion de haut et de bas, de verticalité, de gravité, de légèreté et je m’enfonce peu à peu dans un dédale d’eau oppressante. Mes poumons sont en feu et manquent d’exploser. Puis, soudainement, ma tête émerge enfin des flots tumultueux et une lame salée d’oxygène me transperce les poumons. Mais déjà ma vision se brouille. Une autre muraille titanesque d’eau vibrante me fait face et coupe mon accalmie salutaire. Je dois de nouveau affronter l’océan de mes menus problèmes qui s’amoncellent dans cette lame de fond écumante, dans ce tsunami ondoyant. Cette fois-ci, pas de politique de l’autruche en exécutant la technique du canard : je me retourne. Une fraîcheur fiévreuse surnage sur medium_18.3.jpgmon front. J’agrippe mon surf, je pagaie à toute main et je chasse à toute jambe. Je nage comme un forcené. Déjà la proue de la lame aqueuse me lèche les pieds. Une force phénoménale me soulève à une vitesse insensée. Je pagaie toujours de toutes mes forces, de toute ma déraison. Je me retourne. L’aileron du grand requin bleu me talonne. Je mets un genou sur le surf prêt à cet adoubement extraordinaire. Je me lève d’un trait alors que le sommet de cet Everest ondin me rejoint. Je lance un regard illusoire sur le vide qui me précède et je me lance sur les flancs de ce requin vorace qui martèle mon cerveau et qui est en passe de devenir bientôt un grand requin blanc d’écume, cruellement vorace. Le vent de la vitesse me fouette le visage de ces épines atrocement salées. Le goût des embruns est un doux parfum sur ma peau à présent faussement desséchée. Je me précipite vers un abîme doucement bleuté. Je tombe dans un gouffre qui n’en finit pas. Je glisse dans un doux précipice. L’adrénaline et l’endorphine medium_689.jpgdansent la gigue, la samba et le tango dans mon cerveau, tambourinent dans mes artères. L’extase est là, je la vois me transcender et auréoler mon corps. Je ne fais plus qu’un avec la Nature. Mais bientôt les mâchoires titanesques se referment impitoyablement, voici jaws, j’ose à peine le croire et je me précipite vers un précipice orageux, je m’abîme dans un abîme d’écumes fulminantes, je glisse dans la glossolalie la plus épaisse, je tombe dans ma propre tombe provisoire blanchâtre. Oubli aquatique… Derrière moi, déjà pourtant, une nouvelle série de vagues se profile dans le proche horizon et se glisse à toute vitesse vers moi. Tout est à recommencer ! Et cependant quel bonheur de tout recommencer ! La vie est une perpétuelle errance de naufragé. Accroché à notre frêle esquif, certains de nous atteindront au fil des courants et des jours de calme plat trompeur et de mer d’huile infinie, leur île oasis, d'autres l'entr'apercevrons puis la perdrons à jamais. Serais-je moi-même un perpétuel Ulysse en quête de mon Ithaque lointaine, serais-je toujours un chevalier vagabond en quête du Saint-Graal ? Mon âme se dissout dans le flot brumeux des souvenirs...

     

     

    Doriane Purple 

  • Les limites...

    Je fuis. Vacillement du crépuscule. Le jour s'efface sans un souffle, sans un mot. Il s'évapore, s'envole... pour s'enflammer demain... peut-être... Qui sait ?... Qui le sait ?... Vibration du jour moribond. Cri joyeux et sauvage de la nuit naissante. Regain d'énergie viscérale, primaire, première, primale. Cri de l'animal. La moiteur chaude de la forêt tropicale m'entoure. Je suis un esprit de la forêt profonde. Je suis jaguar... Des oiseaux mouches volettent dans les frondaisons. Sifflements furtifs de serpents. Mygales en embuscade. Coatis en vadrouille. Etourdissement des couleurs. Caïmans noirs. Aras bleus. Aras rouges. Tamarins-lions roux. Daguets rouges. Toucans au bec multicolore. Singes ouakaris à la face rouge. Quetzals au plumage rouge et vert éclatants. Phylloméduses vénéneuses vertes aux yeux rouges. Iguanes arboricoles verts. Serpents liane se confondant dans la végétation. Boas émeraudes. Verts chatoyants. Verts entêtants. Vert aveuglant. Vert omniprésent. Mes yeux de jade guettent chaque mouvement de la forêt vivante. Je me glisse silencieusement dans la végétation. La lumière de la Lune, s'aventurant peureusement entre les feuillages touffus, dessine un étrange tapis mouvant sur le sol terreux. Ma peau tachetée rappelle à chacun mon état d'esprit de lumière et d'obscurité. Bercement des chants d'oiseaux de la lointaine canopée. Chants des couleurs. Je suis Espagnol, Indien,... Jaguar. Singes hurleurs au loin. Ombres mouvantes sous le soleil. Ocelot immobile sur la branche d’un arbre immense. Poussière argentée ou argentine d'ailes de papillons éphémères. Végétation exubérante. Tatous. Toucans. Pécaris. Foisonnement de vies. Foisonnement de proies. Foisonnement de morts annoncées. Scolopendres venimeuses, colonne dévastatrice de fourmis légionnaires, piranhas voraces, anacondas cruels, serpent corail au poison mortel, vipère fer de lance, redoutable esprit de la Terre dont la tête, même tranchée, peut encore attaquer selon les croyances des Indiens. Nouveau monde. Emerveillement de l'inconnu. Nouvelle vie... Nouvelle mort... Nouveau sommeil... Nouveau réveil... Vide temporel de la nuit. Je me réveille, l'âme en proie à l'angoisse, le corps nimbé de sueur lourde et chaude, les yeux aveuglés par l'obscurité malveillante. Où suis-je ? Perte de repères. Oubli du lieu et de l'époque. Peur viscérale de l'inconnu... Je me souviens enfin...
     
     
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    C'est le 1ier avril, jour de sortie de la chanson "Les Limites" d'un certain Julien Doré, un brin blagueur...
     
    Doriane Purple