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Littérature

  • I alone

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    Où sont-ils ? Où sont tous ces gens, toutes ces personnes, toutes ces personnalités, tous ces individus, toutes ces individualités que j’ai tant admirés, que j’ai tant aimés ? Je ne les vois plus, comme si un douloureux suaire recouvrait complètement mes yeux. Où sont ces fantômes du passé sinon rivés dans ma mémoire omniprésente ?
    Je suis seule, je me sens seule, je me sens si seule...
    Avec eux, mon âge d’or enfantin s’en est retourné définitivement.
    Avec eux, mon adolescence dorée m’a tourné le dos.
    Avec eux, ma jeune vie d’adulte mordorée a claqué la porte derrière elle.
    Tous ces grands repères vivants et vitaux de ma petite histoire ont, semble-t-il, disparu dans la brume aigre des années.
    Je me sens si seule, je me sens seule, je suis seule, esseulée...
    Je suis devenue un anachronisme gênant, dérangeant, à fuir absolument de par mon immobilisme révoltant. Plus rien à se dire, plus rien à s'échanger, plus rien à se confier sinon des silences ennuyés. Je suis devenu muette comme une tombe...
    La vie se résume-t-elle à une illusion d’amitié, un mirage d’amour ? Peut-être pas...
    Mais comment alors emprisonner ces moments fugaces dans une longue mais trop fragile bouteille de vie ? Ces instants s’écoulent inexorablement, peu à peu, au dehors, passant au travers du meilleur bouchon cacheté, brisant même le verre par des fissures douloureuses afin de s’épancher et s’échapper plus vite. Mais sur cette Terre grouillante de vies, ne sommes-nous pas seuls depuis notre naissance, abandonnés pour toujours, avec pour tout héritage cette anxiété de l’inconnu qui nous serre la gorge dès notre premier cri, cette angoisse de l’Inconnue qui nous serre le cœur lors de notre dernier râle ?
    Nous sommes toujours seuls, mais nous ne le savons pas… ou nous nous le cachons hypocritement. Nous sommes tous innocents et cherchons vainement tous notre Dame Paix. Alors pourquoi attendre parmi nos semblables solitaires un quelconque Sauveur avec un grand S ? A moins que ce ne soit un grand S comme Solitude ? I Live alone. I alone ! Je ne suis que Solitude...
     
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    Doriane Purple

  • Carnet de voyages immobiles

     

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    Parisien en Amérique, je ne suis que le reflet flou et inversé d’un Américain à Paris. Je ne suis qu’un visage bien pâle apercevant des bribes flashy d’Amérique par le kaléidoscope aux miroirs déformants de la terre atlante submergé qu’est l’Océan Atlantique. Tout est en XXL : les voitures, les buildings, les territoires, les paysages, les Big Macs, les cieux religieux, les dreams, les désillusions, les dollars, même les personnes… Je reste pour ma part dans le camp des filiformes, des anorexiques, des petits formats, des sans-appétits, des maigrichons, des faibles, des indiens enfantins qui l’ont toujours été par choix et qui se font massacrer par des petits desperados racistes sous couvert de la loi de leur étoile factice de sheriffs. Je suis un Sioux, je suis un Cheyenne, je suis un Apache, je suis un Comanche, je suis un Huron, je suis un Navajo, je suis un Cherokee, je suis un Crow à l’âme noire, je suis un Iroquois à la crête sanglante, je suis le dernier des Mohicans, je suis le dernier des Peaux-Rouges,
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    un survivant au tomahawk dressé en l’air, inutile, lorsque le Vieux Continent détruit le Nouveau Monde, lorsqu’il abat par la rougeole, par les armes à feu, par l’eau de feu, par les cadeaux frelatés, par les promesses trompeuses, par les haines fratricides, ma lignée, mes peuples, mes mœurs, mes origines, mon histoire. Je me revendique de cette Amérique-là, originelle et multiculturelle, je suis un Amérindien doucereusement amer dressé à Big Mountain . Je suis un chaman sans manne. Je suis le cœur du tonnerre, je suis Thunderheart.
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    Riders on the Storm. There are killers on the road ! Mes larmes du souvenir s’effacent peu à peu dans la pluie du temps. J’ai entr’aperçu le Light Side of Darkness ou même le Light Side of the Devil. Merlin, le devin visionnaire et prophétique n’était-il pas lui-même le fils du Diable ? D’autres, germanophones, parleraient de Lyserg Säure Diäthylamid… J’ai eu les visions magiques du Roi Lézard messianique régnant sur ses futurs iguanes. J’ai vu des futurs impossibles, des présents irréels, des passés illusoires à travers ses portes fantasmagoriques. There are things known and there are things unknown and in between are the Doors. J’ai vu des rêves psychédéliques d’adolescentes et des cauchemars ternis d’adultes.
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    J’ai vu des visites extatiques et mortuaires, mouillées et sèches, devant ma dernière chaise où je me suis couché, Eros et Thanatos dansant sauvagement sur ma tombe en allumant ma dernière cigarette de condamné damné en me criant, tout en me décrivant et me décriant ironiquement : Light my fire ! J’ai vu mes soixante-deux ans venir et les quarante ans de la première ouverture de mes portes au monde s’échouer sur la plage de la planche à billets cette année. J’ai vu mon remplacement, comme pour mon fils spirituel Michael Hutchence,
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    par une sombre copie commerciale. Je suis pourtant irremplaçable!
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    Je demeure à jamais irremplaçable ! Il ne peut y avoir The 21st Century Doors sans moi ! Mais ne dit-on pas que les irremplaçables jonchent les cimetières ? Je suis resté dans le crépuscule du siècle dernier sans voir l’aube du chemin parcouru par l’impact de ma poésie et de ma musique. Peut-être aussi que ma mort passionnelle a plus contribuer à mon œuvre que mon vivant platoonique.
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    This is the end, my friend, this is the end, my only friend, the end. Je suis Jim et je suis mort. Je suis Val et je suis encore vivant.
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    Doriane Purple

  • Requins du regain...

    medium_27.jpgJe ne suis qu’un fétu de paille sur l’immense océan de la vie. Ballotté, secoué, projeté, chaviré, submergé, noyé, je m’engloutis dans la vague déferlante. Mes yeux s’ouvrent désespérément vers la surface blanchâtre et écumante. Tourbillonnant, tournoyant, chahuté par les éléments en furie, je perds la notion de haut et de bas, de verticalité, de gravité, de légèreté et je m’enfonce peu à peu dans un dédale d’eau oppressante. Mes poumons sont en feu et manquent d’exploser. Puis, soudainement, ma tête émerge enfin des flots tumultueux et une lame salée d’oxygène me transperce les poumons. Mais déjà ma vision se brouille. Une autre muraille titanesque d’eau vibrante me fait face et coupe mon accalmie salutaire. Je dois de nouveau affronter l’océan de mes menus problèmes qui s’amoncellent dans cette lame de fond écumante, dans ce tsunami ondoyant. Cette fois-ci, pas de politique de l’autruche en exécutant la technique du canard : je me retourne. Une fraîcheur fiévreuse surnage sur medium_18.3.jpgmon front. J’agrippe mon surf, je pagaie à toute main et je chasse à toute jambe. Je nage comme un forcené. Déjà la proue de la lame aqueuse me lèche les pieds. Une force phénoménale me soulève à une vitesse insensée. Je pagaie toujours de toutes mes forces, de toute ma déraison. Je me retourne. L’aileron du grand requin bleu me talonne. Je mets un genou sur le surf prêt à cet adoubement extraordinaire. Je me lève d’un trait alors que le sommet de cet Everest ondin me rejoint. Je lance un regard illusoire sur le vide qui me précède et je me lance sur les flancs de ce requin vorace qui martèle mon cerveau et qui est en passe de devenir bientôt un grand requin blanc d’écume, cruellement vorace. Le vent de la vitesse me fouette le visage de ces épines atrocement salées. Le goût des embruns est un doux parfum sur ma peau à présent faussement desséchée. Je me précipite vers un abîme doucement bleuté. Je tombe dans un gouffre qui n’en finit pas. Je glisse dans un doux précipice. L’adrénaline et l’endorphine medium_689.jpgdansent la gigue, la samba et le tango dans mon cerveau, tambourinent dans mes artères. L’extase est là, je la vois me transcender et auréoler mon corps. Je ne fais plus qu’un avec la Nature. Mais bientôt les mâchoires titanesques se referment impitoyablement, voici jaws, j’ose à peine le croire et je me précipite vers un précipice orageux, je m’abîme dans un abîme d’écumes fulminantes, je glisse dans la glossolalie la plus épaisse, je tombe dans ma propre tombe provisoire blanchâtre. Oubli aquatique… Derrière moi, déjà pourtant, une nouvelle série de vagues se profile dans le proche horizon et se glisse à toute vitesse vers moi. Tout est à recommencer ! Et cependant quel bonheur de tout recommencer ! La vie est une perpétuelle errance de naufragé. Accroché à notre frêle esquif, certains de nous atteindront au fil des courants et des jours de calme plat trompeur et de mer d’huile infinie, leur île oasis, d'autres l'entr'apercevrons puis la perdrons à jamais. Serais-je moi-même un perpétuel Ulysse en quête de mon Ithaque lointaine, serais-je toujours un chevalier vagabond en quête du Saint-Graal ? Mon âme se dissout dans le flot brumeux des souvenirs...

     

     

    Doriane Purple 

  • Profession de foi d’une prose prosaïque

    Aux albatros aux ailes de géant les empêchant de marcher…
    A ces princes des nuées qui hantent la tempête et se rient de l’archer…

     

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    Je ne veux point être un de ces Icare qui, par leur fierté effrénée, s’envolent et s’en vont tenter, par leur poétique talent, de côtoyer les dieux immortels, juchés haut sur leur estrade olympienne à jamais inaccessible, risquant ainsi de brûler au Soleil rougeoyant de la gloire fugitive, leurs ailes fragiles pincées de cire illusoirement solide d’abeilles éphémères. Je ne serai jamais l’un de ces Phaéton réclamant à grands cris à leur père Hélios de saisir les rênes de son char flamboyant et ne sachant pas, par leur inexpérience juvénile et par leur trop plein d’enthousiasme, guider l’attelage divin, embrasant alors les cieux, puis la Terre avant, enfin, d’être foudroyés par Zeus arrêtant alors leur catastrophe nucléaire. Il y a bien trop de risques à vouloir se prétendre un dieu. Parfois je l’admets, on le devient à force d’y croire, à force d’y travailler... Mais on le devient toujours dans l’ombre de ces dieux premiers, écrasé par leurs fabuleux exploits passés.
     
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    Dans le crépuscule agité, rougeoyant sombrement, je ne suis moi, qu’un malingre être vivant à moitié dans l’ombre déjà sélénite, frôlé quelquefois par les rayons fantomatiques de ce soleil des loups. Et quand vient le soir, pour qu'un ciel flamboie, le rouge et le noir ne s'épousent-ils pas ?
     
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    Je ne suis qu’un vil et sombre corbeau, perché fébrilement sur un arbre rabougri, desséché, ténébreux, guettant de ses yeux rétrécis et froids, semblables à ceux du fin goupil, la morne plaine napoléonienne d’un lointain Victor, qui m’entoure, résultat de mon bannissement indéfini pour l’expiation de mes châtiments. Car ainsi est mon âme, elle n’est faite que de petits riens, qui se résument à un grand néant. Je ne suis qu’une vulgaire corneille qui boit l’eau de la fontaine du haut d’une racine de la bruyère. Ce ne sont pas quarante siècles qui me contemplent, voire vingt ou encore trois. Aucun temps ne se meut en contemplation à mon sujet. Je ne suis qu’une serre crochue… noire et sale qui trépigne et qui se complaît dans la noirceur des ténèbres terrestres.
     
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    Je me repais et me sustente de l’indicible neurasthénie des cadavres gisants du passé : de-ci, un globe oculaire ayant effleuré les fleurs du mal d’un paysage dantesque, de-là un doigt ayant touché la grâce d’une peau d’albâtre, de-ci, encore, un poing tendu vers les cieux impudiques, frôlant le tragique, de-là, ensuite, un cœur trempé d’un sang jailli d’une passion platonique et inhumaine, tout près d’un foie baignant dans une cirrhose sirupeuse d’excès de traces d’alcool apollinairien.
     
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    Ci-gisent les restes ensanglantés et putrides de ma mémoire exsangue de vitalité. Je me complets dans ces lits mortuaires, dans ces suaires tâchés par les blessures de l’âme, dans ces cauchemardesques sommeils agités et sombrement nocturnes. Des visions atrocement souterraines éclairent mon inspiration d’éclairs noirs qui vrillent mon cerveau, vibrant alors dans de folles contorsions lucifériennes. Parfois, je m’envole d’une aile menaçante aux mauvaises augures sur ces vastes terres désolées qui, tout à la fois, m’effraient et me consolent dans leur immobilité morbide. J’erre, tel une âme en peine, à ras du sol fangeux, chevauchant un vent glacé, accompagné par les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse, inhalant maladivement les râles et les exhalaisons méphitiques de ces charognes décomposées et inspiratrices de mémorial et enfin, en retrouvant mon arbre immonde, je gratte d’une serre malhabile sur son écorce pourrie des hiéroglyphes sibyllines, s’entremêlant et parachevant la prose maudite et prosaïque de mon troisième testament.
     
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    Ce corvidé de ces corps vidés qui anime notre anima animale n’est point une bête qui nous pousse vers l’avant; bien au contraire, cet archange noir et déchu, nous pousse vers notre propre abîme intime, vers notre propre tombe, glissant dans notre sang sa bile noire. Cette bête immonde et immeuble n’est pas l’Ennui mais le Spleen, hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère !
     
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    Doriane Purple



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    Spleen

    Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
        Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
        Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
        Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;
       
        Quand la terre est changée en un cachot humide,
        Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
        S'en va battant les murs de son aile timide
        Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;
       
        Quand la pluie étalant ses immenses traînées,
        D'une vaste prison imite les barreaux,
        Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées
        Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,
       
        Des cloches tout à coup sautent avec furie
        Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
        Ainsi que des esprits errants et sans patrie
        Qui se mettent à geindre opiniâtrement.
       
        - Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
        Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,
        Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
        Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.


    Baudelaire, Les fleurs du mal LXXVIII
  • A la recherche de l’amour perdu…

     

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    Quel est donc ce carcan de condamné qui m’oppresse de jour en jour ? Quelle est donc cette camisole de fou conscient de sa déviance qui m’enserre au point de suffoquer ? Quelle est donc cette armure métallique de soldat déjà mort qui m’emprisonne au cœur de mon univers intrinsèque et introverti ? Quel est donc ce scaphandre cosmogonique qui me plaque face à la noirceur de mes cieux?  Ne serait-ce pas mon parti pris musical qui ne se réfère qu’à mon état d’âme couturé de cicatrices encore chaudes malgré le temps ? Punk, grunge, métal, le noir me va-t-il si bien ? Où est donc mon éclectisme musical salutaire d’antan, d’un temps où l’avenir me semblait être un horizon aux multiples possibilités et non pas une unique  ruelle étroite en sens unique, avec le tombeau comme seule issue ? Où sont passées les voix douces et suaves de Whitney Houston, de Maria Carey, de Lisa Stansfield sinon avalées par la drogue, la dépression ou les rides de la vieillesse naissante sur mes tempes déjà grisonnantes ? Où est cette soif de voyage intersidéral vers d’autres planètes musicales bien plus colorées que mon âme grise et que mon cœur noir ? Le salut viendra peut-être de cette planète à la fois si proche et si éloignée qu’est cette sphère rouge de Mars
     
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    Où es-tu belle brune éburnéenne perdue de l’éclectisme perdu de ma jeunesse perdue ? J'ai le coeur chagrine... Quelle piste as-tu suivie dans cette immensité bruitale ?

    Doriane Purple 

  • Clochard céleste...

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    Traversées discontinues, disjointes, intangibles, contiguës et faussement exiguës, des grands espaces américains sur les rails routiers de l'après seconde guerre mondiale, parsemées d'explosions iniques et désinvoltes, de rencontres passagères, d'amitiés passionnelles et destructrices, d'insouciances inquiètes, de recherches mystiques, sous l'influence affichée de la faim tenaillante, du désir juvénile, de l'alcool frelaté, de l'herbe parfumée ou de la benzédrine trafiquée...

     

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    Grands espaces hachés menu à coup d'auto-stops débridés et de style court, incisif, spontané, fuyant au rythme du Be Bop, zigzaguant sur la carte littéraire état-unienne.

     

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    Vie rongée par la funeste, bien que salutaire, ambition de n'avoir aucune ambition d'avenir. Avaleur de bitume cancérigène, de micro-vies instantanées, de sensations brèves et éphémères, l'oeuvre pilier de la beat generation avait été semée par Kerouac pour s'envoler aux vents aléatoires du temps qui passe, mais elle resta plantée et s'enracina si fortement dans l'Histoire des Etats-Unis et du monde occidental en général qu'elle nous recouvre encore de son ombre. Après la génération perdue d'un Francis Scott Fitzgerald, la génération foutue d'un Jack Kerouac s'inscrivit dans le monde social et inhumain de l'Amérique industrialisée de l'après-guerre, dans le beat lancinant et désabusé du monde dit moderne.

     

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    En ce jubilé de la parution de "On the road", adieu donc Sal Paradise, adieu clochard céleste ?... 

     

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    Doriane Purple 

  • Soyons réalistes, exagérons l’impossible !

    Che Guevara’s Marketing
     
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    Montpellier, ville vivante, grouillante, ébouriffante, fourmillant d’une vitalité désarmante et d’une jeunesse désinvolte, sous la douce chaleur du soleil automnal. Voilà que je m’arrête brusquement devant une affiche dénuée de pudeur, obscène, racoleuse, vantant … les onzièmes Internationales de la Guitare de Montpellier.
     
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    Sur la publicité, on peut y voir un montage de la photographie familière et trop célèbre de Che Guevara, prise à Cuba le 5 mars 1960 par Alberto Díaz Gutiérrez, dit Korda (à moins que ce ne soit par Juan Vivés, dit El Magnifico, un transfuge des services secrets cubains, selon ses propres dires),
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    sa tête profane, profanée d’une hérétique aura christique frôlant le bigotisme et enchassée sur un corps d’éphèbe à chemise flashy de pop-star moderne posant dédaigneusement, une guitare folk à la main et des lunettes noires hautaines vissées sur les yeux. A quand le Che déguisé en Golden Boy de la City ou de Wall Street pour les besoins d’une annonce bancaire, ou en Père Noël pour une campagne publicitaire de grands magasins pour les fêtes de fin d’année ? "Soyons réalistes, exigeons l’impossible" est devenu "Soyons réalistes, exagérons l’impossible". On retrouve déjà son image galvaudée et vendeuse sur des T-shirts d’enfants dans les écoles primaires ou sur la poitrine de bimbos dans les soirées mondaines,
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    dans des magasins d’ameublement sous forme décorative et même peut-être, pourquoi pas, sous la forme de glace "Cherry Guevara".
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    Che Guevara n’est plus qu’une belle gueule représentative d’une jeunesse révoltée et révolue qui, par sa disparition rapide et tragique, suscite le fantasme des consuméristes modernes. La plupart de ceux qui consomment son image ne savent pas ce que le Che était et ce qu’il représente de façon historique et idéologique : la représentation d’un temps où le choix politique était encore bivalent, bien qu’ambivalent. Attention, je ne défends en rien Che Guevara et ses actes. En effet, bien qu’idéaliste et généreux à la base, il a participé sciemment à l’instauration d’une dictature à Cuba après l’éviction de celle pro-américaine de Batista en 1959 et son serment d’Hippocrate a été largement oublié dès lors qu’il a tué pour défendre ses idées. Je ne défends ici que son image et je déplore qu’elle soit aujourd'hui si ironiquement porteuse de valeurs mercantiles sans aucune analyse historique du personnage. A ce propos, mes anciens bailleurs m’assenaient leurs verbiages à chaque fois que je ne pouvais pas les éviter. Ils se vantèrent un jour de s’être payés un voyage à Cuba, destination à la mode semblait-il, et avaient été surpris du culte des "indigènes" à propos d’un personnage barbu que l’on voyait partout dessiné sur les murs. Ce n’était pourtant pas le "président" (sic) de Cuba ! Ce barbu parmi les barbudos n’était autre que le Che. J’ai toujours adoré ces incultes présomptueux et suffisants. Il est vrai que l’on ne peut pas être cultivé en toutes choses communes, bien qu’on le soit en choses fongibles, mais dans ce cas, il est préférable de ne pas parler et de conserver ses logorrhées verbales avant de s’être informé sérieusement. Vous ne me verrez jamais parler ou écrire sur les stratégies footbalistiques, l’art culinaire, la graphie chinoise ou même… l’orgasme féminin. Ce sont des sujets qui me dépassent !
     
    Je connais Che Guevara, ce petit Jésus communiste depuis l’enfance, par l’intermédiaire de la culture cultuelle familiale. Ma grand-mère, qui a 98 ans, conserve à ses côtés les photos familiales et en face d’elle, l'image du Che auquel elle prête, dans sa mémoire défaillante, une hypothétique liaison de jeunesse. J’ai souvenir aussi d’un moment émouvant dans ma prime jeunesse en entreprise où un collègue de travail d’origine argentine m’avouait au détour d’une brève histoire de sa vie, que ses grands-parents avaient été voisins des parents du Che dans sa jeunesse dans un petit village d’Argentine. Le contraste entre le milieu de l’entreprise où nous déambulions et l’évocation de ce souvenir peu libéral où nous voguions était par là même cocasse, mon style beatnik ayant certainement suscité ses aveux à peine murmurés. Autre souvenir plaisant : l’affiche inversée et donc risible d’un Che portant un T-shirt à l’effigie de Renaud, à la sortie d’un des concerts de ce même chanteur.

      
     
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    Un homme est mort et son cadavre, après presque 40 ans, ne repose toujours pas en paix...
    Adieu donc l’icône usée d’un univers passé, vive la carte postale publicitaire d’un monde moderne consumériste !
    ¡Hasta siempre la victoria… del liberalismo !
     
    Bibliographie bien loin d’être exhaustive :
     
    Che de Pierre Kalfon , très riche, très documenté et très intéressant pour mieux comprendre le parcours de Che Guevara, livre qui a inspiré le film El Che
     
    Révolte consommée de Joseph Heath et Andrew Potter (commenté magiquement par Pierre Assouline et par Le Monde diplomatique) ou L’art de la récupération de la révolte
     
    A quand aussi un Kurt Cobain trônant sur des chaises hautes pour bébés ou vantant virtuellement une quelconque marque de voitures?
     
     
    Doriane Purple 

  • Chatoiement...

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    Le chat

    I

    Dans ma cervelle se promène
    Ainsi qu'en son appartement,
    Un beau chat, fort, doux et charmant.
    Quand il miaule, on l'entend à peine,

    Tant son timbre est tendre et discret ;
    Mais que sa voix s'apaise ou gronde,
    Elle est toujours riche et profonde.
    C'est là son charme et son secret.

    Cette voix, qui perle et qui filtre
    Dans mon fond le plus ténébreux,
    Me remplit comme un vers nombreux
    Et me réjouit comme un philtre.

    Elle endort les plus cruels maux
    Et contient toutes les extases ;
    Pour dire les plus longues phrases,
    Elle n'a pas besoin de mots.

    Non, il n'est pas d'archet qui morde
    Sur mon coeur, parfait instrument,
    Et fasse plus royalement
    Chanter sa plus vibrante corde,

    Que ta voix, chat mystérieux,
    Chat séraphique, chat étrange,
    En qui tout est, comme en un ange,
    Aussi subtil qu'harmonieux !

    II

    De sa fourrure blonde et brune
    Sort un parfum si doux, qu'un soir
    J'en fus embaumé, pour l'avoir
    Caressée une fois, rien qu'une.

    C'est l'esprit familier du lieu ;
    Il juge, il préside, il inspire
    Toutes choses dans son empire ;
    Peut-être est-il fée, est-il dieu ?

    Quand mes yeux, vers ce chat que j'aime
    Tirés comme par un aimant
    Se retournent docilement
    Et que je regarde en moi-même

    Je vois avec étonnement
    Le feu de ses prunelles pâles,
    Clairs fanaux, vivantes opales,
    Qui me contemplent fixement.

     

    Charles Baudelaire

     

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